Expérience de la solidarité : salaire unique ou « salaire au besoin »

  • Auteur/autrice de la publication :

Source : https://www.bastamag.net/salaire-au-besoin-egalite-salariale-alternative-cooperative-Scop-boulangerie-Le-Pain-des-Cairns-reconnaissance-du-travail

Sujet : Une coopérative boulangère repense la notion de rémunération et l’expérimente en vrai grandeur avec un « salaire au besoin »
Lieu : Le Pain des Cairns.

Premier bilan contrasté après 6 mois d’expérimentation. La question qu’ils se posent : que doit rémunérer le salaire ? La stricte part de l’effort productif ? Ou bien doit-il intégrer les conditions sociales d’existence du travailleur ?

1) Caractéristique de la boulangerie
* une coopérative ouvrière qui fonctionne sur un principe simple : le salaire unique (1600 € plus primes). Chacun occupe les diverses fonctions (boulanger, vendeurs, etc).
* le fonctionnement est « horizontal », sans chef ni vote, toutes les décisions sont prises au consentement

2) La problématique : le salaire au besoin
* Un des boulanger a sa fille qui entre en classe préparatoire d’où nouveau besoin, le salaire n’est pas adapté à certaines réalités. Ils se posent la question : comment adapter ? En fonction du mérite, du temps en production, volume, efficacité, privilégier les tâches intellectuelles, de gestion, etc. Impossible d’élaborer une grille des salaires prenant en compte ces paramètres
* Idée : renverser la perspective, en dissociant les tâches accomplies de la rémunération obtenue en se focalisant sur les besoins d’où « salaire au besoin ».
* Ils décident d’une expérimentation de 6 mois avec 5 personnes :
– 2 qui souhaitent garder le même salaire
– 1 qui demande 150€ de plus
– 1 qui demande 250€ de plus
– 1 qui demande 500€ de plus.
Cela entraîne une augmentation de la masse salariale qui va être prise en charge par une augmentation de l’espace de vente et une légère augmentation des horaires d’ouverture.
Surprise : le chiffre d’affaire passe de 600 000€ à 1 million d’€. Plus que nécessaire. Cela permet une augmentation de salaire à tous…

3) Bilan
La plupart des participants se montrent dans un premier temps réservés sur les suites à donner. Raisons :
* perte en confort de travail (horaires, relations avec les clients, etc)
* Un équilibre qu’ébranle la forte croissance économique du commerce : la salaire unique semble plus juste.
* les relations ne se sont pas altérées, mais quelques remarque (p.e. ce n’est pas aux autres de payer pour tes enfants).
* l’expérience questionne sur les critères légitimes sur lesquels doit reposer le principe de mutualisation qui fait le ciment de nos sociétés
* salaire unique : ok pour l’égalité, mais quid de la solidarité ? D’où l’idée de prendre en compte l’âge, le nombre d’enfants, la situation parentale pour définir une nouvelle grille des salaires.
* Estimer son travail, c’est déjà très difficile, estimer ses besoins, également. Alors les deux ensemble…

4) Conclusion
Très satisfait de l’expérimentation. Ils élaborent une nouvelle grille des salaires prenant en compte l’âge, le nombre d’enfants, la situation parentale.

5) Commentaires
Suite à l’article de Bastamag un certain nombre de commentaires ont été écrits :
– la perte des acquis sociaux entraîne des expérimentations dans de petites structures.
– Ils retrouvent ainsi les idées de sursalaire pour les camarades parents mis en œuvre par des coopératives-associations de travailleurs dès 1848 !
– À chacun selon ses besoins ». C’est du pur marxisme.
– cette idée de salaire « au besoin » n’a rien de révolutionnaire : la fonction publique fait quasiment la même chose (des points supplémentaires à l’ancienneté, une majoration pour les parents…), depuis longtemps, et bien plus massivement. Réponse de la coopérative : l’innovation consiste ici dans le fait que la grille salariale est discutée collectivement et décidée par les gens à qui elle va ensuite s’appliquer

Laisser un commentaire