Ci-après mes notes de lecture de ce livre de Frédéric Lordon.
0. Introduction
3 énoncés :
• Le capitalisme est entré dans une phase où il détruit l’humanité. Il faudra choisir entre persévérer ou persévérer dans le capitalisme pour s’éteindre.
• jamais les capitalistes ne se rendront à leur responsabilité et jamais ils ne renonceront à la poursuite de « leur jeu ».
• il n’y a aucune solution de renversement du capitalisme dans le cadre des institutions.
Si discussion : c’est très vite capitalisme ou goulag. Pourtant le communisme n’a jamais existé. Il faut que le communisme soit désirable pour lui-même et non contre le capitalisme. Il doit se donner des figures. L’une possible : lesalaire à vie de B.Friot que F.Lordon appelle « garantie économique générale ». Avec Idem Friot : séparation activité – revenu, propriété collective d’usage, suppression de la finance, caisse d’investissement. Il s’agit de reconstruire un mode de production: adéquation entre nos désirs matériels et menace sur la planète.
- Certitude du désastre
Ce ne sont pas la multiplication des petits gestes écolos qui va freiner la progression du capitalisme. Le capitalisme c’est plus qu’une croyance : une évidence et son contraire un impensable radicale. En générale à 0 l’extérieure du domaine d’une croyance on trouve la non-croyance, ici non. Le capitalisme n’a pas d’extérieur, donc les solutions sont à trouver à l’intérieur ! Il n’y a plus que des problèmes et des solutions à trouver. Il y a bien une seule cause aux fortunes obscènes, à la maltraitance salariale, à la précarisation généralisée, à la dévastation de la planète : le capitalisme. Et il n’y a pas de solutions ni sociales ni environnementales dans le capitalisme, sauf a méconnaître son fonctionnement. Donc c’est lui où nous.
2 Le scoutisme, stade suprême du capitalisme.
Tous ces organes qui proposent des solutions capitalistes ( vertes, de transition, innovatrices) aux problèmes du capitalisme ! Un mot à la mode : réparer qui permet de ne rien changer. Tout ce côté boy-scout, démocratiser l’entreprise capitaliste, l’espoir que l’on va pouvoir bouger et renverser les choses gentiment, tous ensemble, etc : un doigt dans l’œil.
Si on dit que le problème c’est le capitalisme, il faut donc en sortir et être anticapitaliste.
3L’internationalisme de l’évitement.
Qu’est ce qui a créé ce problème intordable entre souverainetés locales et introuvables régulations institutionnelles globales, sinon le capitalisme ? Le capitalisme a tissé un réseau d’interdépendance capable de propager le pire depuis n’importe quel point du monde vers tous les autres. Comment construire le peuple européen ? Si on prend l’exemple de la France qui s’est construite avec beaucoup de douleurs. Ce sera pareil pour l’Europe. Ce n’est pas gagné quand on voit le vol de masques de certains gouvernements, ou le fait de dire on ne paie pas pour les autres.., il reste beaucoup de chemin à faire. Si l’Europe devenait un État-nation il s’y développerait le même autoritarisme que dans les autres grands pays (E-U, Chine, Russie, etc) avec police, services secrets qui traquent tous ce qui n’est pas conforme. c’est Kant qui parle d’État despotique dès que la taille est grande.
Le communisme comme garantie économique générale.
- « En sortir», mais de quoi et par où ?
Il est temps de se demander de choisir entre l’économie ou la vie. Il faut comprendre économie dans le sens où elle consiste à fabriquer un certain type d’homme : l’homo-economicus tourné vers ses intérêts personnels. Mais par quels mécanismes allons-nous purger les individus de leurs adhérences d’égoïsme calculateur ? L’économie : tyrannie de la valeur d’échange. La valeur d’échange ignore la qualité. Il faut que la production matérielle collective s’organise sous d’autres rapports sociaux que ceux de la valeur capitaliste.
Comment ? Non par la juxtaposition de communs (zad, potager, etc) s’ils n’intègrent pas la division du travail. Aucune communauté restreinte ne peut internaliser l’entièreté d’une production. Exemple : stylo : il faut du métal, donc mine, extraction, façonnage donc machine outils, encre donc chimie, etc. Et donc produire sous quelles formes d’agencements collectifs et sous quels rapports sociaux.
5. Transitions
Il ne s’agit pas de verdir le capitalisme, mais d’en sortir. Ce qui veut dire « perdre le niveau de vie » du capitalisme et le communisme devra le définir par délibération collective. Et à ce niveau le penser en déplacements successifs plutôt qu’en grands bonds ! Le renoncement et la substitution ne commencent qu’à partir d’un socle minimum : nourriture, logement, eau, médecine… ! : L’autonomie du petit collectif est désintéressé du changement d’ensemble ou collectif-fuite sans égard
pour ceux qui restent derrière. Exemple des clubs de trocs et monnaies parallèles en Argentine et le retour au système dès que ça va mieux. Mais cela peut aider à la maturation et à l’élargissement.
Impasse de la décroissance
La décroissance est le projet insensé de n’avoir pas à renverser le capitalisme. « Décroître » en capitalisme : la récession. Dire sortie de capitalisme. Dans un monde communiste croissance et décroissance qui sont des concepts capitalistes n’ont plus lieu d’être. Dans leur cadre les capitalistes et les néolibéraux ont objectivement raison. Il faut donc un autre cadre !
- Ouvertures
Exercices de méthodes et conséquences. D’abord nos orientations fondamentales et urgences et enchaîner à tous partir de là nos idées :
- Production matérielle : les individus n’ont pas à être soumis à des rapports de subordination hiérarchique.
- Garantie de tranquillité matérielle et subsistance.
- La production est subordonnée à la nature.
Il faut évacuer les vieilles figures du communisme (goulag, KGB, abolition de la propriété privée,etc) et construire un nouvel imaginaire. Bonne base de départ : Friot avec le salaire à vie : cotisation générale et conventionnement.
L’ensemble de la valeur ajoutée va dans des caisses qui en assurent la redistribution : Une caisse qui va distribuer un salaire attaché à la personne (et non à l’emploi). Une partie versée sur le compte et une partie sur une carte Vitale étendue utilisable que chez des producteurs conventionnés pour le respect de certaines normes. Il semble que Friot veule mettre en place ce conventionnement et cette cotisation progressivement dans le système capitaliste. C’est la « petite transition ». Le hic : le capitalisme ne laissera pas faire. C’est l’échec garanti. Commençons donc par la grande transition.
- Transition dans la transition.
Le capitalisme fait dépendre les existences matérielle de deux entités souveraine : le marché et l’emploi. Et il faut en finir avec ces deux dépendances. Le « salaire à vie » ou la garantie économique générale (SAV ou GEG) : bonne base de départ.
Suppression de l’argent : l’échange de services, très bien pour des échanges à courte portée (il faut que je trouve un besoin chez une personne qui le possède et qui a un besoin dont je dispose) mais cela ne peut se généraliser à toute l’étendue de la division du travail. Il faut donc conserver le marché.
Quel type de marché?
Le marché ne sera plus l’instance de validation sociale comme dans le capitalisme. SAV ou GEG fournit les moyens matériels à l’individu et il apporte sa production personnelle à la production collective. Dans ce cadre la planification est un outil important (WallMark et Amazon utilise beaucoup) en plus des propositions privées.Avec le SAV ou GEG toutes les places de la division du travail ne trouveront pas preneur dans une sorte d’harmonie spontanée. Il faudra donc demander que les individus restent en place, le temps de réorganiser : assignation transitoire. Dans ce cas on peut envisager le niveau de qualification 4 dans le SAV. On peut envisager la dé-division du travail. Les tâches cruciales (corvées,etc) seront assumées à tour de rôle.
- Fermer la finance.
Système Friot : le financement de l’investissement de fait par la caisse économique. Voir le « déjà-là » du financement intégral des CHU par la cotisation. Le financement néolibéral est un poison. Il n’y a aucun progrès social possible sans la destruction complète de ses institutions. Codicille cela veut dire sortir de l’euro.
Le fléau du libéralisme :
• il détruit le salarié via le pouvoir des actionnaires
• il détruit les services publics via les créanciers.
Le principe : avance et attente de retour (avec intérêt).
La dette est un cliquet à croissance. Et pour contrer la finance : la subvention via la cotisation générale. Rupture avec le principe avance et retour.
Proposition : Toute la valeur ajoutée est redistribuée via une caisse des salaires, une caisse des services publics et une caisse économique. Cette dernière en charge du subventionnement des projets. En fait il s’agit de plusieurs caisses économiques (fédérées) au plus près des territoires. Ce sont elles qui vont guider les nouvelles orientations à faire prendre a la division du travail. Et toutes les dettes (entreprises, ménages, publiques) seront annulées dès le début du début. Prendre en compte l’épargne de sécurité, de précaution, etc des ménages tant que ceux-ci n’auront pas été rassurés par la GEG et de très bons services publics. Donc fixer un plafond. Et redistribuer aux ménages. Il faudra certainement contingenter car la masse monétaire (300 Mrds livret A et 1800 Mrds d’assurance) redevenue disponible entraînerait une forte inflation. En mettant en balance le avant – après, le jeu en vaut la chandelle !
- Pour un communisme luxueux.
Le capitalisme ou l’usurpation de la vie, sauf pour les plus riches. Supprimer la pub et laisser la rue aux grapheurs, artistes de rue, etc. Cela va entraîner une explosion de créativité. L’idée du communisme luxueuse consiste à réfuter l’idée qu’une réduction de la quantité voudrait dire enlaidissement de notre vie matérielle. Dans le capitalisme les choses belles dont réservées aux riches, mais le luxe peut surgir d’autre chose (bien faire, faire beau : CK voir potier de Vassivière ou l’art japonais minimaliste, voir les travaux de décoration fait par les restaurateurs pendant le confinement, etc). Les gens débarrassé des contraintes matérielles par la GEG font les choses bien pour les proposer à la reconnaissance sociale.
- Garantie économique générale et production culturelle.
La culture dépend des subventions de l’État, mais elle est sous la pression constante de « il faut réduire la dette publique ». Le capitalisme a donné à la validation sociale la forme monétaire. Et donc on en arrive à la concurrence. Le capitalisme confond émulation et concurrence : c’est le poison (CK voir club kayak, voir également l’émulation en recherche : les résultats sont jugés par des paires, et en compétition les projets et les résultats sont jugés pas des financiers et donc mis en concurrence).Voir les divers prix et festivals de prix. L’avantage de la GEG est que le verdict social d’une œuvre n’a pas d’impact sur la survie matérielle du proposant. Il faut affirmer qu’une société qui permet plus d’écriture, peinture, musique, dessin, photo, etc est meilleure qu’une société qui produit plus de téléphones.
- Ils ne lâcheront rien.
Pour l’instant aucune analyse concrète des conditions pour aller vers le changement. Il y du monde « en face » organisé, puissant. La démondialisation et la relocalisation des chaînes de valeur : une fable pour enfants. « Après » ce sera pareil en pire. Le capital a conquis un pouvoir qui l’autorise à ne plus négocier. Il impose ! Même le gouvernement ne négocie plus, il consulte. A supposer un gouvernement de gauche sortie des urnes : la finance se déchaînera (vente de titre de la dette souveraine, –> montée des taux d’intérêt), les médias déferlement de haine, le patronat bloquera les embauches, etc bref sabotage pour briser au plus vite. Quiconque touchera à la propriété privée des moyens de production trouvera la bourgeoisie sur son chemin.Voir la Commune, le Chili, etc .et c’est la voie démocratique qui a été mise en œuvre et qui nous montre l’impasse. Allende a refusé d’armer la classe ouvrière, on connaît la suite. Même un gouvernement un peu de gauche qui souhaiterait modifier le rapport entre capital et travail serait rapidement défait par les forces du marché et les forces de la propagande médiatique.
La démocratie n’est pas très démocratique…elle n’a plus lieu d’être dès que le capitalisme se sent attaqué. Et bien sûr les journalistes pseudo intellectuels et Jürgen Habermas vont répéter à l’envie : la démocratie notre bien le plus précieux !
Conclusions Les deux premières à oublier.
• si « la voie démocratique vers le socialisme » est impraticable alors il ne reste que le statu quo ou règne des avant-gardes révolutionnaires.
• par la violence : les armes ou tirer sur la foule.
• mesurer ce qu’il est possible d’obtenir par voie démocratique et évaluer ce que le capital est capable de faire en situation de menace.
- L’adversité du dehors.
Communisme dans un seul état. Et dehors c’est le capitalisme. Essayer de devenir tout petit, se faire oublier, et accepter une diminution drastique de biens matériels. Sinon comment organiser la division du travail avec l’extérieur ? Mais le capitalisme ne laissera pas faire, voir les quelques pays non capitalistes d’Amérique du Sud. La perspective communiste est une affaire macro-sociale, qui ne résoudra pas dans les autonomies locales (même si c’est important de les faire progresser).
- Les craquements dans l’hégémonie.
La quantité d’énergie nécessaire : il a fallu une guerre mondiale, désastre économique, compromission des élites dans la collaboration pour que la bourgeoise cède un aménagement dans le capitalisme. Actuellement échecs après échecs . Il n’y a pas de parade immédiate, mais une réponse stratégique pour le long terme adossée à une analyse.
A l’intérieur du cadre mis en place par le capitalisme aucun succès significatif n’est possible, attaquons-nous au cadre : financiarisation, libre-échange,ordolibéralisme. Et s’attaquer au cadre c’est faire de la politique. Le syndicalisme doit donc devenir un syndicalisme politique. A observer tous les mouvements sociaux qui deviennent le bruit de fond de la société, c’est signe de phase de délabrement ou comme le dit Gramsci « crise organique ». Un symptôme : l’arrivée de personnage désaxés par rapport aux standards politiques : Sarkozy, etc.Macron. Ils forclosent la réalité pour lui substituer un monde de mots valant réalité. Ce dérèglement du langage est le corrélat d’un ébranlement structurel profond. Les forces de l’ordre politique produisent de la répression à proportion de ce que les forces de l’ordre symbolique échouent a produire de l’adhésion. La crise organique est là, et c’est le signe d’une possibilité.
- Anticapitalisme et antiracisme.
Éléments pour un bloc contre- hégémonique. Pourquoi ? Capitalisme et colonialisme : l’accumulation primitive. Les deux avec la bénédiction de l’État. Même si aujourd’hui les deux ne sont plus forcement liés. Le capitalisme est passé à la prédation et à la corruption. Et même aux guerres impérialistes. Le capitalisme va chercher pour les segments les plus rebutant de la division du travail les plus instrumentables c’est a dire ceux qui se trouvent en bas de l’échelle de dignité.
De même le rapport de domination sexiste se révèle entièrement fonctionnel au rapport de domination capitaliste. Mais comme pour le racisme il est capable d’hybrides pourvu que son rapport de domination ne soit pas altéré : bienvenue aux noirs et aux femmes à condition qu’ils exploitent. Le capitalisme fabrique lui-même sont propre gradient de dignité, a travers les conditions sociales des CSP+ jusqu’aux indignés dont il a besoin dans certaines divisions du travail. Et ce gradient se superpose au « classique » : race, féminin, etc.
Les rapports capitalistiques sont institutionnalisés: droit de propriété dans la constitution, la subordination dans le droit du travail, etc. La domination capitaliste est par conséquent défendue par l’État. D’où la violence contre les manifestants anticapitalistes. A contrario le racisme et le sexiste ne sont pas institutionnalisés ils sont systémiques. La société contemporaine est donc une société capitaliste.
Toutes les luttes sont indépendantes et occupent des territoires différents. Ce serait idiot de subordonner une lutte à d’autres.
Conclusion :
- Construire un bloc contre-hégémonique n’est possible que s’il y a reconnaissance de l’égalité qualitatives des luttes.
- Reconnaître à toutes les luttes leurs autonomies relatives et leurs domaines.
- La domination capitalistique occupe la place supérieure des dominations, et elle peut se maintenir si les autres se réduisent.
- Il faut que les luttes sortent d’un certain régime d’inattention aux autres luttes. Et ne collaborent pas avec des organisations capitalistes. Se poser la question : à qui se lier pour conduire sa lutte. Ne rien faire qui puissent nuire aux autres luttes.
Propositions pour construire un bloc :
• égalité qualitative des luttes
• trouver des mots d’ordre transversaux par exemple autour de : égalité, justice, dignité qui sont des percuteurs immédiatspourtous les dominés.
Par conséquent.
- Entre le capitalisme et l’humanité : c’est lui où nous.
- Il n’y a aucune sortie du capitalisme envisageable par « débat » où « consensus ».
- Par conséquent, le communisme est une idée à réinstaller sur la scène de l’histoire.
Réponse de Lordon au courrier d’un ami. Lordon pense que la colonisation et donc le racisme est consubstantiel au capitalisme. Idem de l’échange nord-sud. L’échange inégal nord-sud joue un rôle fondamental dans l’idée de ce qu’est « être blanc » sur le plan social au nord. Et on comprend mieux le déclassement des blancs et le passage « du PC au FN » via un processus de tiers-mondialisation des blancs.
Les capitalistes ont le monopole de l’investissement ; si l’État ou les producteurs associés peuvent investir autant que les capitalistes alors il y a danger mortel.